Une succession anormale de contrats de mission et de CDD peut être requalifiée en CDI
13 janvier 2021La Cour de cassation, dans son arrêt du 12/11/2020 rappelle que même dans les secteurs d’activité où il est d’usage constant d’avoir recours au contrat de mission ou au contrat à durée déterminée, la relation de travail doit rester temporaire. Sans quoi, le contrat peut être requalifié en contrat à durée indéterminée, avec les conséquences financières que cela implique.
Dans cet arrêt, la Haute juridiction a analysé le cas d’une personne engagée en qualité d’ouvrier docker occasionnel, par plusieurs entreprises de travail temporaire qui l’ont mis à disposition de l’une des sociétés de manutention portuaire sur le port de Dunkerque, au moyen de deux cent un contrats de mission. avant d’être recruté directement par la société dans le cadre de contrats à durée déterminée d’usage.
Lorsque la relation de travail entre l’employeur et l’ouvrier s’est interrompu, le second a saisi la juridiction prud’homale de demandes tendant à obtenir la requalification en contrat à durée indéterminée des contrats de mission temporaire ainsi que des contrats à durée déterminée, avec toutes les conséquences attachées à la rupture injustifiée d’un contrat à durée indéterminée.
Dans sa décision, la Cour de cassation estime que :
[…] le recours à l’utilisation de contrats de missions successifs impose de vérifier qu’il est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.
Ayant relevé que les contrats de mission conclus en 2006 et 2007 mentionnaient comme motif de recours « emploi pour lequel il n’est pas d’usage de recourir au contrat à durée indéterminée » et que l’entreprise utilisatrice, avec laquelle la relation de travail s’était poursuivie de manière continue au moyen de contrats à durée déterminée d’usage, se contentait d’affirmer que, compte tenu du caractère fluctuant et imprévisible de l’activité de la manutention portuaire, le recours aux ouvriers dockers occasionnels se justifiait nécessairement par une tâche précise et temporaire indissociablement liée au secteur d’activité de la manutention portuaire sans qu’elle ne verse, aucun élément permettant au juge, de vérifier concrètement l’existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi occupé par le salarié, la cour d’appel a pu, par ces seuls motifs, en déduire que la relation de travail devait être requalifiée en contrat à durée indéterminée à compter du premier contrat de mission irrégulier.
Ainsi, la Cour estime que la rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamne donc la société. La relation de travail est, quant à elle, requalifiée en contrat à durée indéterminée.